Les enfants parisiens connaissent bien ce lieu un peu étrange, hors du temps, qu’est la ménagerie du Jardin des Plantes. Un endroit où les petits urbains peuvent découvrir différentes espèces animales, malheureusement enfermées et avec peu d’espace libre. Depuis que je suis enfant, j’ai toujours été aimantée par l’enclos entièrement vitré des orangs-outans. Rien que l’évocation du nom de l’animal, énigmatique, me projetait dans un univers imaginaire très riche… On collait son nez sur la paroi, et si, par chance, l’un d’eux était près de vous, il était alors possible de poser, délicatement, sans geste brusque, sa main à plat sur la vitre en espérant qu’il ou elle pose aussi la sienne. Et l’on entrait ainsi en contact, en silence. Impressionnant échange compte tenu de la taille imposante de ces mammifères.
Nénette était l’une de ces orangs-outans, j’ai donc eu sans doute la chance de croiser son regard triste un jour de promenade dans cet endroit où j’aime toujours me retrouver. Un lieu de l’enfance, privilégié, un peu comme un refuge, un espace-temps régressif, délicieux à déguster, encore et encore.
Ce fut donc comme une évidence que le livre de Claire Lebourg me fit de l’oeil, au détour d’une étagère lors de la conférence de presse de l’école des loisirs. Petite boule orange acidulé, entourée de feuilles automnales, Nénette m’a appelé : Viens, emmène moi… et le souvenir de ces après-midi au Jardin des Plantes a ressurgit. J’avais l’impression que ce livre était là pour moi, qu’il m’attendait. Avec émotion, j’ai caressé la couverture aquarellée et j’ai plongé dans le récit poétique et touchant de cette grande Dame de Paris. J’ai tourné les pages, j’avais 8 ans…
Nénette a 40 ans, c’est la doyenne de la Ménagerie, il est temps pour elle « de retrouver sa liberté et de profiter d’une retraite bien méritée ». Le directeur du Zoo lui a trouvé un petit deux-pièces sous un toit de Paris. Un coin rien que pour elle. Luxe, calme et volupté, une nouvelle vie commence. Libre de ses mouvements, Nénette découvre la capitale en vélo, fait ses courses chez Monoprix, pique une tête dans le bassin du Jardin du Luxembourg, et semble nager dans le bonheur.
Mais voilà que l’automne et ses couleurs flamboyantes s’en vont déjà, et la froideur de l’hiver et comme celle de la vie urbaine ne conviennent pas vraiment à l’âme exotique de Nénette.
Même la montagne de bananes du supermarché ne lui fait pas passer ce petit arrière-goût nostalgique de ses contrées natales. Elle rêve de grands espaces verts, de la chaleur du soleil, de fruits juteux à souhait… Bornéo l’appelle.
Ce magnifique album (ok je ne suis pas objective, je sais, mais tant piche d’abord, na !) est bien inspiré d’une histoire vraie.
C’est à la suite du visionnage du documentaire de Nicolas Philibert que Claire Lebourg a trouvé son personnage pour son premier livre, auto-édité avec succès en 2013.
L’aquarelle, c’est le véhicule du rêve. Les couleurs flottent doucement autour des regards malins et des postures cocasses de cette Nénette au pelage fauve complètement craquante et dont on prendrait bien la main pour un voyage vers l’ailleurs, jamais trop loin du pays de l’enfance.
Un vrai coup de coeur pour ces double-pages illustrées avec grâce et délicatesse, on aimerait que le format soit encore plus grand pour entrer entièrement dans cet univers poétique. Petit bonus : un tirage numéroté d’une illustration qui orne mon petit chez moi désormais.
Un petit bijou de tendresse, d’humour et légèreté !
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Auteure / Illustratrice : Claire LEBOURG (cliquer ici pour voir son site)
Edition : l’école des loisirs – 60 pages – 13,50 euros
Année : Septembre 2017 – Première audoédition en 2013
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Voir l’entretien en vidéo de Claire Lebourg par l’école des loisirs
De la même auteure :
– Une journée avec Mousse
– La nuit d’anniversaire
– Bonnes vacances, Mousse !
Voir un extrait du documentaire de Nicolas Philibert sur Nénette