Sillage

Quel titre ! Quelle couverture ! Quel voyage multisensoriel !

Alchimiste absolue des mots-sensations, Joanne Richoux nous livre ici avec Sillage un texte d’une fougue incandescente, d’une poésie enivrante à se pâmer, d’une sensualité à fleurs de peaux qui palpitent, se hument et se dévorent.

Dans une adaptation contemporaine rock, désinvolte et jubilatoire du Parfum de Süskind, on suit le personnage de Jade, jeune femme de 19 ans arrivée fraichement de sa Bretagne à Paris pour tenter de réaliser son rêve, travailler dans la parfumerie. Jade est une sensitive, les odeurs la traversent et constituent depuis longtemps une bibliothèque olfactive intérieure qui l’anime.

Ivre de liberté, elle découvre la capitale, ses dangers et ses plaisirs, puis percute la trajectoire de Victor, lunatique insaisissable à la fragrance troublante qui lui troue le cœur. Elle dérive, somatise et se perd dans ces effluves amoureuses toxiques. Et puis, un sursaut de vie, la rencontre avec Zacharie Mignard, ce génial artisan parfumeur, mentor inespéré qui voit dans sa spontanéité la folie du génie créateur.

Une révélation ? Celle d’un parfum voluptueux, fatal et résolument unique ? Où trouver l’inspiration si ce n’est au plus profond des êtres qui vous hantent, même si cela signifie briser les interdits ?

Continue Reading

T’as vrillé

« C’est une balafre, aimer »

Danaël, 17 ans, cheveux longs décolorés et oreille piercée par amour se consume pour l’insaisissable et enchanteresse Florine, son « égratignure ». Reliés par Polly de Nirvana : direct le coup de foudre. Illumination, aveuglement, désillusion. Car, même s’il est consommé, cet amour n’est pas réciproque. Danaël part en vrille, totale, fatale.

C’est l’histoire d’un premier amour, un crush obsédant, qui ravage et qui ronge. Une connexion hypersensible mais à sens unique, une passion déchirante qui fissure et laisse des traces, une dévotion aliénante qui vire à la possession, violente.

« T’es un peu perché. »

Au fil des pages, on suit les pas chaotiques de Danaël, papillon de nuit qui s’est brûlé le cœur. On respire à son rythme, avec difficulté parfois, tant l’atmosphère moite de cette brume environnante invite au malaise. C’est un monologue intérieur, une confession où le narrateur s’adresse directement à nous par intermittence, une voix envoûtante et dérangeante qui prend le lecteur/la lectrice par la main puis à la gorge.

Si l’on se laisse séduire au tout début par sa naïveté vulnérable devant cet amour non partagé, on glisse vite dans l’effroi face à la folie glaçante dans laquelle Danaël sombre, froid, détaché. Sidération.

Continue Reading

Outrageusement romantique

Nouvel opus dans la collection Court Toujours et toujours aussi réussi. Prêt à plonger ? On plante le décor : un adolescent traine ses 14 ans en vacances en bord de mer. Pour amplifier le spleen : la pluie, des parents et une petite sœur pénibles, « ma mère a la force de persuasion des marées. De l’érosion ». Et l’ennui, le sentiment de décalage, d’être hors de cette vie, l’introspection. « Cet été-là, le soleil semblait avoir disparu du monde. »
Quand soudain, le choc, la rencontre d’un regard, celui de l’énigmatique Louise, inoubliable, absolue. Tout est chamboulé. Romantique ? Oui, et alors ! En secret avec Louise, il apprend la guitare ; il rêve à cet amour naissant qui l’obsède.

Ensemble, ils se complètent, ils s’accordent si bien selon lui, même si les parents ne s’en rendent pas compte. Une attirance mystérieuse, troublante, entre rêve et réalité, entre fantasme et souvenir, entrainés l’un par l’autre par l’envoûtante Chaconne de Bach. Et puis un coup de tonnerre ! Palpitant !

Je suis fan du format « nouvelle » qui embarque dès les premières lignes et promet un rythme soutenu vers la résolution d’une tension souvent « dramatique » (au sens théâtral) en peu de pages. Exercice difficile mais remarquablement réalisé par Manu Causse portant la voix de cet adolescent frappé par un coup de foudre. Pas de prénom, cela pourrait être vous ou moi, un choix qui implique encore plus le/la lecteurice. Et quel titre ! Le ton un peu sarcastique de cet ado mal dans sa peau sonne juste et prend le cœur, puis la tension monte d’un cran. Comme un éblouissement, le texte prend un autre éclairage lorsqu’il est question de Louise, l’espoir est là, le désir s’éveille, la confession du trouble qui prend ce jeune garçon et le dépasse touche par sa sensibilité.

Continue Reading

Orageuse

Avouez que le goût d’Arpège vous manquait. Son sillage aux effluves de chèvrefeuille, son regard obscur à l’éclat magnétique, cette inéluctable attraction qui vrille les sens et étourdit l’esprit. Violette sait de quoi je parle, au plus profond d’elle.

🌿« Son prénom. Son prénom au bout de la langue. Arpège. Deux syllabes balles de fusils. »

Car la douleur la hante maintenant : une plaie immense qui palpite sans cesse et étouffe sa raison, un supplice qui renait au moindre ressenti de cette fragrance envoûtante, au moindre souvenir de ce pays des Muses où il vit, lui, sans elle.

Déracinée, bancale, incomplète, Violette est désaccordée. Le chagrin d’amour, issu d’une rupture violente et inéluctable, est comme un poison qui la gangraine. Une passion brisée en plein vol, séparant deux mondes, deux êtres, deux corps, deux cœurs. « Cousus l’un à l’autre ».

Il suffit d’un bref regard sur cette couverture dont la sensualité inquiétante électrise un peu pour qu’on replonge, éperdument dans la poésie des mots de Joanne Richoux.

Continue Reading

Emilie Chazerand nous parle de son nouveau roman La Fourmi Rouge et de ses lectures d’enfance

(c) Sarbacane

Oyez, oyez ! À l’occasion de la sortie du futur bestseller « La Fourmi Rouge » (chroniqué ici) aux éditions Sarbacane (J-1 mon ami, si j’étais toi, j’irai de ce pas enlevé mais élégant commander ce fabuleux ouvrage chez ton libraire chéri), Emilie Chazerand nous parle de sa passion pour l’écriture, de son pétillant et impertinent personnage Vania Strudel (VANIA POWA !!!), ainsi que de ses lectures d’enfances. 

Quelques éléments de présentation : « Emilie Chazerand vit près de Strasbourg, où elle a été « trouvée dans un paquet de nouilles » en 1983. Petite, elle dévore les livres. Après avoir été infirmière, elle se met à écrire des aventures tarabiscotées et peu à peu, les livres reprennent la première place dans sa vie. Elle a une bicyclette hollandaise, deux matous dodus, trois francs six sous, quatre blagues rigolotes, cinq bonnes raisons de se lever le matin, six projets pour quand elle sera vraiment grande et sept vies, comme les chats. »

De la passion (une tonne), du talent (des tonnes), de l’humour (des exatonnes): un cocktail explosif qui va faire du bruit !  

Lâchez ce que vous êtes en train de faire et découvrez l’univers de cette auteure à la plume bien affutée ! 
 
– – – – – – – – – – – – – – – – – – – – – – – –
 

– La Licorne à Lunettes : La Fourmi rouge vient de sortir, un futur bestseller à coup sûr : quelles ont été vos sources d’inspiration principales ? Comment est née Vania Strudel ? D’où vous vient cet humour décapant qu’on décèle dans vos précédents ouvrages (Je suis fan de Quel morfal ce Gwendal ! et Suzon) et qui excelle encore une fois ici dans ce roman si désopilant et impertinent ?

Emilie Chazerand : J’ai écrit la Fourmi rouge pendant ma seconde grossesse. C’était une période où je pensais à mon passé, mon histoire personnelle, et à l’avenir de mes enfants. J’essaie souvent de visualiser l’adolescence de ma fille, par exemple. J’imagine les choses auxquelles elle sera immanquablement confrontée et je frémis déjà pour elle. Je crois que j’ai eu envie de lui fabriquer une bonne copine. Quelqu’un qu’elle pourra retrouver au chaud, dans des pages, et qui la rassurera. À cette période, elle ne viendra certainement pas chercher réconfort et consolation chez moi. Je serai bien trop vieille, débile et nulle à ses yeux. Mais elle aura Vania. Les livres peuvent être de merveilleux soutiens, je le sais pertinemment.     
  

Continue Reading