Marie-Verte

Marie-Verte est née avec la peau verte. Qu’importe pour ses parents et ses nombreux frères & sœurs « blonds comme des biscuits », ils l’aiment, bien évidement. À l’école, ce fut un peu plus difficile, sa différence étonnait mais sa gentillesse lui permit de s’entourer de copains, son talent pour les déguisements de Carnaval étant également un grand atout. Mais quand Sidonie essaye de lui ressembler en se peinturlurant de vert, Marie-Verte est perturbée. Finalement sa différence la questionne profondément et elle se sent bien seule. Y a-t-il quelqu’un quelque part qui lui ressemble pour de vrai ? N’a-t-elle pas un autre destin ? Après quelques recherches, elle décide de partir en quête… en quête d’elle-même. Un voyage initiatique qui la fera grandir.

Dans cet album où les mots se répondent comme une comptine, Emilie Chazerand aborde un thème majeur et que nous vivons tous à un moment de notre existence, quelles que soient nos différences ou nos ressemblances : l’acceptation de soi et la recherche de notre place dans ce monde. Au-delà de la différence de peau, il s’agit avant tout de parler de respect et d’acceptation des différences d’une manière plus générale. Vaste questionnement philosophique évoqué ici avec pudeur et tendresse, et bien sûr toujours avec un soupçon d’humour 😉

Savoir apprivoiser les autres c’est une chose mais savoir s’apprivoiser soi-même, se connaître et s’aimer, c’est tout une quête, un chemin parfois sinueux et rempli d’embûches. Mais finalement, c’est ce que nous faisons tous intérieurement, ce cheminement vers la connaissance de nous-même et d’autrui, c’est ce qui fait de cette vie de rencontres une source renouvelée de complémentarités, une vraie richesse humaine.

Côté illustration, un beau travail sur les couleurs et une grande richesse de petits détails dans cette grandes planches immersives. Forcément, un jeu sur toutes les tonalités de verts. Couleur de l’espoir ? Sans doute !

Et pour en savoir un peu plus sur cette thématique, Emilie Chazerand a accepté de répondre à trois questions.

(c) Sarbacane

INTERVIEW EXCLUSIF AVEC EMILIE CHAZERAND

La Licorne à Lunettes : Quelles ont été tes sources d’inspiration pour le personnage de Marie-Verte ?

Émilie Chazerand : Eh bien, pour imaginer Marie-Verte, je n’ai pas eu à chercher très loin : c’est un peu moi… Pour tout dire, j’ai une histoire familiale invraisemblable, clairement foutraque, avec des mélanges de genres, de mondes, de cultures, intéressants mais déstabilisants. Comprendre qui j’étais, lorsque j’étais petite, ne fut pas chose aisée et encore moins innée. Je me souviens très nettement, par exemple, avoir été choquée de comprendre, au fil de mes premières années, que la fille, dans le miroir, c’était moi. Je ne m’imaginais pas du tout comme ça ! Et Marie-Verte aussi a dû sursauter une paire de fois en se surprenant dans le miroir. D’ailleurs, très tôt, elle compense sa différence par un comportement irréprochable, une personnalité géniale, loufoque, créative. Elle n’est jamais en colère, ni dans le reproche. Elle veut s’intégrer si dur… Marie-Verte fait des efforts pour être aimée malgré sa particularité alors que, dans un monde parfait, elle n’en aurait pas besoin.

La Licorne à Lunettes : Tu manies les rimes subtiles qui font de tes albums des comptines invitant tout de suite à la lecture à voix haute. Cette rythmique des mots est importante pour toi, pourquoi ?

Émilie Chazerand : Je n’ai aucune idée d’où ça vient, ce truc d’écrire en rimes quand je fabrique un texte d’album. Je crois que ça relève plus du toc que d’autre chose… J’ai beaucoup de mal à me défaire de cette forme et m’y oblige parfois. Et puis parfois non. Il y a des éditeurs à qui ça plait plus qu’à d’autres. Une des toutes premières éditrices à qui j’ai eu affaire m’avait dit « c’est bien sympa, vos petites comptines, là, mais on ne cherche pas ça… ». Et je m’étais juste dit « Ah ouais ?! Je fais des comptines… Cool. » Mais, en vrai, j’aime bien la musicalité, dans les mots. Il faut que ça ait du sens, bien sûr, mais si on peut faire joli au passage… C’est peut-être aussi parce que je suis malentendante. Les sons représentent un truc complexe dans ma vie, dans mon quotidien. J’essaie sans arrêt de les apprivoiser, de les mémoriser. Au moins, lorsqu’ils sont écrits, et décrits, je ne peux plus les perdre.

La Licorne à Lunettes : Derrière l’humour ou la tendresse, l’histoire de Marie-Verte transmet un message profond sur l’acceptation de soi et la place qu’on a dans le monde. Ce thème te tient à cœur, pourquoi ?

Émilie Chazerand : Oui, c’est vrai que tout ça, si on fouille un peu, reste globalement au cœur de tout ce que j’écris. Mais c’est parce que c’est si vaste ! Et tellement difficile ! Ça demande un temps, un investissement et une maturité folle, de s’accepter. Se trouver et se sentir bien, avec ce qu’on est et à l’endroit où on est. Je ne sais pas s’il est possible pour moi de me sentir exactement à ma place, quelque part, tout le temps. De ne pas osciller entre deux pôles, deux origines, deux langues. Voire trois. Marie-Verte, comme moi, n’est pas venue au monde avec une place préparée sur mesure pour elle, toute tiède et rassurante. Elle nait et elle bouscule tout, elle perturbe tous, et inversement. Sans le vouloir. Alors elle est obligée de se la faire, cette place, tant bien que mal, en explorant différents territoires. Elle fait un grand, un long, un beau voyage pour partir en quête d’elle-même. Comme des tas de gens, en réalité. Comme moi, aussi. On se perd, souvent, mais de temps en temps, on croit arriver à destination. Toucher du doigt quelque chose qui s’approche de la sérénité absolue, de la réalisation de soi. Et c’est presque parfait.


Autrice : Emilie CHAZERAND
Illustratrice : Marion ARBONA
Edition : Sarbacane – Album – 40 pages – 15,90 euros
ISBN : 9782377316076
Année : Avril 2021

De la même autrice chez Sarbacane : 
– Falalalala (chroniqué ici)
– La Société des Pépés à Adopter (chroniqué ici) avec Joëlle Dreidemy
– Ma vie moisie, Dieu et moi Shirley Banana avec Joëlle Dreidemy
– Les choukachics magiques avec Aurélie Guillerey
– Le génie de la lampe de poche (chroniqué ici) avec Joëlle Dreidemy
– La fourmi rouge (chroniqué ici)
– Jean-Jean à l’envers, avec Aurélie GUILLERET
– La petite sirène à l’huile

Et Chez Gantier-Languereau
– Cette année j’ai cantine ! (chroniqué ici)
– La soeur des vacances
– Le bébé s’appelle Repars
– Quand je serai reine
– Les papas de Violette (chroniqué ici)
– Mon Pépé

Et aussi : 
– Le Grizzli Virus avec Amandine Piu chez L’Elan Vert (chroniqué ici)
– Meugli, Edition Benjamin Media (CD audio) 
– L’ours qui ne rentrait plus dans son slip,  Edition Benjamin Media (CD audio) avec Félix Rousseau
– La vérité vraie sur Mireille Marcassin, Edition Benjamin Media (CD audio) avec Amandine Piu
– La série Suzon dont : Suzon part en pique-nique & Suzon et la chasse au trésor, avec Amandine Piu chez Gulf Stream
– Quel morfal, ce Gwendal ! aux éditions Les deux coqs d’or, (chroniqué ici)
– Moi Président, aux éditions Les deux coqs d’or
– Chère Mamie avec Charles Dutertre chez L’Elan Vert
– L’horrible Madame Mémé, avec Amandine Piu chez L’Elan Vert
– Y en a qui disent, avec Maurèen Poignonec chez L’Elan Vert
– Apocalypsis, une série fantasy chez Matagot/Nouvel Angle.

 

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