L’âge du fond des verres

L’âge, c’est important ? Oui, enfin surtout à la cantine, où, quand on le cherche au fond des verres, on est fier du 33 et on tait le 5. C’est exactement ce que pensait Guilène avant d’entrer en 6e et de se rendre compte que ses parents étaient… vieux, mais vraiment vieux selon elle. La 6e : une étape décisive, le début de l’adolescence et des codes qui vont avec.

Pour Guilène dont les parents ont l’âge d’être ses grands-parents, cela ne posait aucun souci jusqu’au jour où elle se rend compte du décalage avec le mode de vie des parents de ses amis.

Un fossé s’ouvre, plongeant Guilène dans une grande perplexité et un sentiment de honte dur à assumer. Car elle est heureuse avec eux, la vie est chouette même si ça manque de modernité. À sa grande surprise, ils acceptent de recevoir la classe entière pour un dîner de fête, un événement marquant qui va avoir des conséquences dans la perception des élèves de la classe de Guilène. Les moqueries vont bon train et son amitié naissante avec Cléa est mise à mal. Pour aggraver la situation, Mme Ivano, la prof de maths, s’acharne contre elle et Aron, le délégué idéal, la trouble. C’est la panique. Guilène est déchirée entre son amour pour ses parents et sa colère contre les rageux. Tout bouillonne en elle.

Dur dur les prémices de l’adolescence, l’image qu’on est en train de construire vis-à-vis des autres et de soi-même. Avec tendresse, humour et bienveillance, Claire Castillon évoque cette période initiatique où le regard des autres peut être destructeur. Il est question d’acceptation de soi, de respect des différences, d’amitiés et d’amour familial avant tout, toutes générations confondues.

L’âge, c’est dans la tête, non ? Certains sont restés à l’âge bête et leur méchanceté gratuite blesse, sans doute car ils sont mal dans leur peau. C’est en se frottant à ce crépis qu’on grandit. Un roman à hauteur d’enfance, au ton juste, mêlant humour, introspection et prise de conscience. Une voix touchante, celle de Guilène qui aura beaucoup grandit durant ce premier trimestre.

Coup de cœur pour ce passage plein d’espoir :

« Avons-nous tous, comme ça, des peaux de rechange, parfois rêches et parfois douce, des peaux d’échappement qui nous permettent d’évacuer de notre moteur à combustion interne quelques mauvais gaz, de stabiliser la pression ? Bientôt nous aurons tous des peaux catalytiques pour réduire la nocivité de qui sort de nous. Il y a tant de grands projets humains qui nous attendent. » 


Autrice : Claire CASTILLON
Edition : Gallimard Jeunesse – 176 pages – 12 euros
ISBN : 9782075143684
Année : Janvier 2021

De la même autrice :
– Les longueurs
– River
– Proxima du Centaure (chroniqué ici)

 

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