Selma et Samir

Toujours fidèle à la douceur des mots de Mymi Doinet, je me suis plongée dans l’histoire touchante de Samir et Selma.

Comme pour « Un piano pour Pavel », « Coco n’est pas zinzin » et « Ma vie de dico », Mymi donne la parole aux objets ou animaux pour raconter l’histoire des personnages d’un point de vue extérieur.

Souvent l’occasion d’aborder des sujets forts qui la touche particulièrement comme les errances de foyer en foyer d’un jeune orphelin, la maladie d’Alzheimer ou encore ici les conditions des migrants et notamment celles des enfants.

Samir a 12 ans et il raconte dans ses poésies son histoire, son voyage périlleux qui l’a amené en France, loin de sa « Nahéma » au Mali, sa grand-mère qu’il aime tant.

Selma a 11 ans et prend régulièrement des photos de son univers pour en montrer la beauté, jusqu’au jour où son appareil capture le regard profond et triste de Samir.

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Esther Andersen

Je ne me lasse pas de relire ce grand album depuis sa sortie. Comme pour tous les livres de Timotée de Fombelle, le temps n’a pas de prise sur ces histoires contées avec force sensibilité.

Un grand coup de cœur, forcément, un double, évidement. Ce grand format paysage est une réussite pour s’immerger entièrement dans ce territoire de l’enfance, cher à l’auteur. Le choix du trait fin et si expressif d’Irène Bonacina s’impose comme une évidence.

« C’était les vacances. » Ces mots magiques vous transportent immédiatement dans vos souvenirs d’enfance, comme le narrateur. Chaque année, ce petit bout d’homme se rend en train chez son oncle, pour deux mois de vacances estivales dans une maison perdue dans les champs de maïs. Une maison remplie d’objets récupérés et entassés depuis longtemps, comme une caverne d’Ali Baba. Le jeune garçon retrouve ce vélo rouge maintenant à sa taille qui l’emmène chaque jour faire des spirales autour de la maison, de plus en plus grande chaque année. Un champs de liberté sans limite où presque, le plaisir simple de rouler en harmonie avec la nature, où l’on veut, cheveux aux vents. Le soir amenait une assiette de pâtes au beurre et des histoires fabuleuses contées par l’oncle Angelo. Un goût d’enfance pur.

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Décomposée

Piquée au vif
par l’arrivée de Clémentine Beauvais dans la collection L’iconopop,
ma curiosité fût plus que récompensée.

Harponnée par l’idée que la célèbre « Charogne »
décrite par Baudelaire dans ce poème fondateur puisse prendre la parole,
j’ai été envoûtée par cette voix profonde si incarnée.

Au détour de ce sentier, Charles et sa muse Jeanne croisent une carcasse en décomposition. Mais ce sont les mots de cette être pourrissant, dont les bêtes grignotent les miettes et que la nature avale inexorablement qui nous arrivent. Cette voix qui « dit » Grâce. Littéralement. La voix de cette femme déterminée, Grâce, qui, du fond du peu de chair qui lui reste, confie sa vie à cette âme sœur inespérée, Jeanne.

Jeanne écoute la voix de Grâce, dévouée à la cause des femmes, qu’elle a l’impression de comprendre, étape de vie après étape de vie. Depuis la brutalité de l’enfance où elle est un rempart pour ses petites sœurs, l’arrivée en ville dans une maison close où « ces amies sont comme des sœurs », ses talents pour manier l’aiguille en tant que couturière de tissus le jour et réparatrice de chairs la nuit, ou encore bouleversante faiseuse d’anges et grande griffue vengeresse des oubliées. Une vie de sacrifice. Une voix criante de liberté.

Il n’y a pas de plus intense voyage que celui que permet le pouvoir de l’imaginaire dans l’écriture. Quel point de vue brillant, quelle virtuosité dans l’enchâssement des récits : confidence personnelle, souvenirs, dialogues entre les personnages, mêlant roman, polar et théâtre. Le tout cadencé par le rythme des vers libres, dont les sonorités entrent subtilement en résonnance et dont la musicalité est renforcée par les jeux graphiques de la mise en mots. Jubilatoire ! Un texte habillement ciselé qui se lit, s’écoute et s‘admire comme une œuvre multisensorielle.

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Le chapeau charmant

Avez-vous pris le temps d’observer les nuages récemment, en marchant le nez en l’air ou allongé dans l’herbe ? Un plaisir d’enfance facilement ré-appropriable si vous vous laissez le temps de ce voyage imaginaire. C’est ce que fait cette petite fille pour chasser l’ennui, en cette fin d’été dans ce parc où la chaleur est assommante.

Quand soudain, zouim, elle glisse sur un chapeau. Etrange ce chapeau abandonné. Qui l’a oublié ? S’ouvre alors pour elle le champs des possibles pour cet objet anodin. Elle lui invente plusieurs vies : un grand-père l’aurait perdu pendant sa sieste ? Un gondolier de Venise en voyage à Paris l’aurait égaré en traversant le parc ? Une musicienne qui s’en servait pour récolter quelques sous l’aurait oublié pour rejoindre un admirateur ?


Le lendemain, le chapeau mystérieux est toujours à sa place, l’occasion pour elle de s’imaginer danseuse de claquette ou funambule le chapeau à la main. Elle le respire, et là par magie lui reviennent les mots de son oncle poète. Mais l’orage gronde bientôt. Que va devenir le chapeau sous la pluie ? Pour le savoir, il faudra lire ce roman court si touchant, qui dit combien notre part d’imaginaire fait notre richesse intérieure et que les surprises peuvent surgir au détour d’une branche de prunus.

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Lettre à toi qui m’aimes

« Regarde-moi clairement un instant :
entre nous, il y a un paquet de trucs qui n’arriveront jamais. »

Comment savoir si on se plait ? Et quand l’amour est à sens unique, que faire, que dire ? Faut-il briser le cœur dans l’œuf avant qu’il ne saigne ?

Pénélope, Dudley et Jobs recrutent un nouveau guitariste pour répéter avec leur groupe hors du lycée. Yliès, un ténébreux et énigmatique métalleux aux yeux de velours. Or l’amour s’invite dans cette bande de potes : Yliès aime Penny mais ce n’est pas réciproque. Si Penny joue avec les limites au début, elle sait vite que rien ne se fera. Yliès se pâme, Penny tente d’éteindre les feux mais le poids de ce amour obsessionnel et unilatéral est étouffant.

C’est une voix qui parle tout au long de ce récit hybride, entre roman épistolaire et journal intime, échanges sms ou mails, dialogues et réflexions intérieures. C’est la voix de celle qui n’aime pas, point de vue inédit qui démonte les archétypes du roman d’amour.

Quel rythme, quelle musicalité dans l’écriture où chaque phrase ciselée comme un poésie convoque les émotions, fait vibrer les cordes sensibles et percute avec justesse ! Une non-liaison dangereusement inflammable, une confession intime de celle qui n’aime pas vers celui qui se meurt d’amour, amante inaccessible et amoureux transi friendzoné. Je n’ai pas lu ce texte, j’ai écouté Penny me le murmurer avec sa voix de bourreau inconscient qui a pris tout l’espace sonore dans ma tête. Un récit en vers libres qui pulse, à vivre d’une traite.

BONUS EXCLUSIF – BONUS EXCLUSIFBONUS EXCLUSIF
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Et qui de mieux que les personnages du roman pouvaient poser des questions à l’autrice sur son ouvrage ? Impossible ? Carrément possible ! Une interview exclusive de Julia Thévenot par Pénélope, Yliès et Dudley en personnes.

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