George Sand – Fille du siècle

Quelle vie ! Quelle fresque historique et humaine ! Quelle personnalité ! Quel engagement et quelle détermination !

Ma rencontre avec George Sand date de l’enfance, de façon détournée via la vie de Chopin dans un vieux livre-audio où Francis Huster évoquait notamment leur passion. Puis, la rencontre littéraire avec La petite fadette et la Mare au diable, forcément, comme beaucoup. Et ces deux tableaux connus, Aurore Dupin une fleur dans les cheveux par Auguste Charpentier et George Sand en veston par Eugène Delacroix. Mais finalement, je connaissais peu cette femme d’exception.

Dans ce roman graphique complet et très documenté, Séverine Vidal retrace avec beaucoup de tendresse et de réalisme cette vie de libertés, sociale, politique, amoureuse, littéraire… Dès la première page, le rythme est donné, la famille d’Aurore quitte l’Espagne pour retrouver Nohant, la tension de la guerre est bien palpable, une urgence se dégage de ces premières planches, un désir de vivre intense, et c’est ce qu’on ressent tout au long de cette biographie, cette force de vie qui anime celle qui deviendra cette autrice engagée, figure de l’émancipation des femmes et du peuple.

Continue Reading

Décomposée

Piquée au vif
par l’arrivée de Clémentine Beauvais dans la collection L’iconopop,
ma curiosité fût plus que récompensée.

Harponnée par l’idée que la célèbre « Charogne »
décrite par Baudelaire dans ce poème fondateur puisse prendre la parole,
j’ai été envoûtée par cette voix profonde si incarnée.

Au détour de ce sentier, Charles et sa muse Jeanne croisent une carcasse en décomposition. Mais ce sont les mots de cette être pourrissant, dont les bêtes grignotent les miettes et que la nature avale inexorablement qui nous arrivent. Cette voix qui « dit » Grâce. Littéralement. La voix de cette femme déterminée, Grâce, qui, du fond du peu de chair qui lui reste, confie sa vie à cette âme sœur inespérée, Jeanne.

Jeanne écoute la voix de Grâce, dévouée à la cause des femmes, qu’elle a l’impression de comprendre, étape de vie après étape de vie. Depuis la brutalité de l’enfance où elle est un rempart pour ses petites sœurs, l’arrivée en ville dans une maison close où « ces amies sont comme des sœurs », ses talents pour manier l’aiguille en tant que couturière de tissus le jour et réparatrice de chairs la nuit, ou encore bouleversante faiseuse d’anges et grande griffue vengeresse des oubliées. Une vie de sacrifice. Une voix criante de liberté.

Il n’y a pas de plus intense voyage que celui que permet le pouvoir de l’imaginaire dans l’écriture. Quel point de vue brillant, quelle virtuosité dans l’enchâssement des récits : confidence personnelle, souvenirs, dialogues entre les personnages, mêlant roman, polar et théâtre. Le tout cadencé par le rythme des vers libres, dont les sonorités entrent subtilement en résonnance et dont la musicalité est renforcée par les jeux graphiques de la mise en mots. Jubilatoire ! Un texte habillement ciselé qui se lit, s’écoute et s‘admire comme une œuvre multisensorielle.

Continue Reading

Ne m’oublie pas

En exergue, une citation du roman Les Années d’Annie Ernaux. Récit d’époques qui s’enchaînent, de morceaux de vie, de traces qu’on ne veut pas oublier et pourtant « s’annuleront subitement les milliers de mots qui ont servi à nommer les choses, les visages des gens, les actes et les sentiments ». Il est question de mémoire, de celle qui nous échappera.

Dès la couverture, l’émotion saisit. Des teintes de nostalgie et de douceur, et un titre tragique qui résonne, comme un appel au secours, comme une ultime requête.

Marie-Louise, la grand-mère de Clémence atteinte d’Alzheimer, vient de faire à nouveau une fugue depuis la maison de retraite où elle est prise en charge. Une de trop pour le centre qui annonce à Clémence et sa mère qu’un traitement chimique va lui être administré pour éviter qu’elle cherche à s’échapper afin de retrouver sa maison d’enfance en bord de mer. Insupportable décision pour Clémence qui entretient une relation très proche avec sa Mamycha. Une fois revenue au centre, Clémence constate que sa grand-mère est abrutie par les médicaments. Un véritable électrochoc qui la pousse, par désespoir, à l’embarquer dans une escapade en voiture loin de cet enfer. Changement de tonalité : un interrogatoire dans un commissariat, Clémence est accusée d’avoir enlevé sa grand-mère. Et les flash-back de ce road-trip imprévu se déroulent sous nos yeux page après page, dans un enchainement de situations plus émouvantes les unes que les autres.

Continue Reading

Raowl T.1 La Belle et l’Affreux

Tu connais pas Raowl ? Et bien hâtes-toi fissa, mon ami !

Plantons un brin le décor : une princesse attend en haut de sa tour le prince charmant qui viendra la délivrer de ces barbares assaillants. Un conte classique ? Que tu crois ! Car voici que surgit Raowl, une Bête assoiffée de batailles. Bon, Raowl ne fait pas dans la dentelle, ce n’est pas un prince conventionnel, il faut bien l’admettre. Il tranche, il découpe, il raccourcit, il décapite tout ce qui peut se mettre entre lui et le bisou d’une princesse… 

Seulement, la dite Princesse n’est pas réceptive à son charme viril, un peu trop brut. Pas vraiment blond, pas vraiment beau, pas vraiment délicat, loin de l’idéal de la damoiselle. Sauvée de force par cette bête qui étripe tout ce qui se rapproche trop près d’elle, la princesse charge Raowl de lui trouver un « vrai » prince charmant. Et s’il réussit sa mission, il recevra en récompense le Graal ultime : un baiser. Mmmh ça sent un peu l’arnaque ? Faut voir 😉

Continue Reading

Le Jardin, Paris

Dès la parution en teasing des premières planches, j’avais suivi de près la sortie de ce roman graphique dont le style graphique m’avait envouté. Et c’est un grand coup de cœur.

Dès la couverture, vous êtes plongé.e dans les années 20, à Paris. Cette lampe Art déco et la lumière derrière le rideau de velours rouge annoncent la couleur et le sujet. Un cabaret nommée « Le Jardin » où toutes les femmes portent un nom de fleur et ont chacune une place particulière.

Cette silhouette en coulisses, un brin timide mais déterminée, est celle de Rose, un jeune garçon de 19 ans qui va se lancer sur les planches. Car, comme toutes les filles qu’il fréquente depuis sa naissance au cabaret dirigé par sa mère, Rose veut danser et se produire sur scène devant un public, c’est plus fort que lui et il est doué.

Si la renommée du « Jardin » n’est plus à faire, le talent de Rose est vite remarqué et devient l’attraction principale. Bien entourée par les Fleurs, Rose baigne dans une ambiance familiale, chaleureuse et protectrice. La solidarité est naturelle.

Quand Rose danse, il n’est pas « lui » ou « elle », c’est au-delà de cela, Rose emporte dans ses mouvements l’âme du public qui est touché par tant d’émotions, et particulièrement Aimé. Le « petit bourgeon » est en train d’éclore et c’est émouvant.

Continue Reading