
Oyez, oyez ! À l’occasion de la sortie du futur bestseller « La Fourmi Rouge » (chroniqué ici) aux éditions Sarbacane (J-1 mon ami, si j’étais toi, j’irai de ce pas enlevé mais élégant commander ce fabuleux ouvrage chez ton libraire chéri), Emilie Chazerand nous parle de sa passion pour l’écriture, de son pétillant et impertinent personnage Vania Strudel (VANIA POWA !!!), ainsi que de ses lectures d’enfances.
Quelques éléments de présentation : « Emilie Chazerand vit près de Strasbourg, où elle a été « trouvée dans un paquet de nouilles » en 1983. Petite, elle dévore les livres. Après avoir été infirmière, elle se met à écrire des aventures tarabiscotées et peu à peu, les livres reprennent la première place dans sa vie. Elle a une bicyclette hollandaise, deux matous dodus, trois francs six sous, quatre blagues rigolotes, cinq bonnes raisons de se lever le matin, six projets pour quand elle sera vraiment grande et sept vies, comme les chats. »
De la passion (une tonne), du talent (des tonnes), de l’humour (des exatonnes): un cocktail explosif qui va faire du bruit !
– La Licorne à Lunettes : La Fourmi rouge vient de sortir, un futur bestseller à coup sûr : quelles ont été vos sources d’inspiration principales ? Comment est née Vania Strudel ? D’où vous vient cet humour décapant qu’on décèle dans vos précédents ouvrages (Je suis fan de Quel morfal ce Gwendal ! et Suzon) et qui excelle encore une fois ici dans ce roman si désopilant et impertinent ?
Emilie Chazerand : J’ai écrit la Fourmi rouge pendant ma seconde grossesse. C’était une période où je pensais à mon passé, mon histoire personnelle, et à l’avenir de mes enfants. J’essaie souvent de visualiser l’adolescence de ma fille, par exemple. J’imagine les choses auxquelles elle sera immanquablement confrontée et je frémis déjà pour elle. Je crois que j’ai eu envie de lui fabriquer une bonne copine. Quelqu’un qu’elle pourra retrouver au chaud, dans des pages, et qui la rassurera. À cette période, elle ne viendra certainement pas chercher réconfort et consolation chez moi. Je serai bien trop vieille, débile et nulle à ses yeux. Mais elle aura Vania. Les livres peuvent être de merveilleux soutiens, je le sais pertinemment.


Emilie Chazerand : Cela implique de s’ouvrir un peu. Aux incertitudes, aux doutes, aux questionnements et aux émotions les plus crues. D’être honnête, aussi, je crois. Adultes, on apprend à communiquer de façon adaptée, avec un tas de filtres. C’est important, parce que ça évite des passages à l’acte sanglants, mais c’est extrêmement triste, aussi. Vieillir, c’est raboter et polir ce qui déborde et dépasse, pour devenir conforme à ce qu’on exige de nous. L’adolescent est plus libre. Il ne le sait pas mais il est dans la phase la plus audacieuse et authentique de son histoire. Alors quand on écrit pour eux, il faut tenter de l’être un minimum.

Emilie Chazerand : Je vais être extrêmement décevante mais je dois avouer que je n’ai pas une connaissance encyclopédique des auteurs contemporains. Je suis une petite vieille qui porte un masque de trentenaire et j’aime beaucoup les écrivains morts… Je lis peu de littérature dite « jeunesse ». Déjà, parce que je trouve ce cloisonnement un peu débile et assez symptomatique des névroses de notre époque. Tout compartimenter, classifier, genrer… Je suis bien trop bordélique pour rentrer dans ce délire.



Mais s’il faut absolument que je donne des noms, je dirai que j’aime beaucoup Marie-Aude Murail et que, selon moi, Clémentine Beauvais a un cerveau d’une beauté époustouflante. Même si c’est bizarre de le dire de cette façon.
Emilie Chazerand : Je ne veux me fâcher avec personne mais, selon moi, Tibo Bérard a tout compris au métier d’éditeur et en est la version la plus moderne et aboutie. Il est enthousiaste, optimiste, soutenant. Il est touchant dans son investissement. Il aime les histoires, les personnages et, de fait, les auteurs. Je crois sincèrement que pour bien faire son travail, on a besoin de reconnaissance, de valorisation et de bienveillance. Et Tibo le sait. (ou alors il fait super bien semblant et c’est une crapule de compète.) Il s’adapte, pige très vite les fragilités de son interlocuteur, les compense. Il est perfectionniste, jusqu’au-boutiste même. Il fouille, creuse, exhume, cherche, avance, revient en arrière… Il est hyper sérieux et travailleur tout en étant léger et vraiment drôle. Il a une âme d’enfant et une cervelle d’homme d’affaires, en somme. J’ai adoré bosser avec lui. Et je comprends qu’on organise des combats de rue clandestins dans tout Paris pour avoir ce privilège… 
La Licorne à Lunettes : Je vous comprends… Hum, revenons à vous. Vous avez déjà publié plusieurs albums jeunesse. Comment travaillez-vous avec les illustrateurs/illustratrices, notamment avec Amandine Piu ? Avez-vous quelques anecdotes ?

Certains ont parfois des demandes de réajustements sur le texte, en fonction de la manière dont ils veulent le traduire en image, comme Aurélie Guillerey par exemple. Elle est très exigeante envers elle-même et très soucieuse de la qualité du produit fini. C’est une orfèvre. Elle ne ménage pas ses efforts et c’est très enrichissant de bosser avec elle.Avec certains, je fais juste connaissance par mails interposés, et ça peut être très joyeux et tendre comme rester assez formel mais très cordial.


Amandine, c’est encore différent. On est proches, dans la vie. Elle est la marraine de mon fils, la super copine que j’appelle quand je crois que le Monde me hait, le binôme avec lequel j’invente des histoires pour des livres impubliables.
Mon rêve de petite fille était d’écrire un livre pour enfants. Et, quand j’étais encore infirmière et que je voyais ses cartes postales fleurir partout, chez moi à Strasbourg, j’ai rajouté une condition difficile à ce rêve : écrire un livre pour enfants illustré par Amandine Piu. Je l’ai rencontré ensuite, en vrai, et je me suis dit « Et en plus, c’est une nana tellement géniale !! ». Y a rien à jeter, chez Amandine. Je garde tout.Emilie Chazerand : Je me méfie vachement des gens qui ont des « missions », moi. J’écris des histoires, je n’ai aucune prétention ni autre ambition que distraire le temps de quelques pages. Bon, si je dois vraiment m’en trouver une, je pense que j’aimerai donner aux enfants et aux adolescents l’envie de continuer à lire. De découvrir d’autres auteurs, d’enrichir leur petite bibliothèque interne. C’est tout. Je ne me prend pas trop au sérieux : je m’amuse beaucoup en écrivant, en bidouillant un petit univers. C’est mon « truc ». J’aurai tout aussi bien pu rempailler des chaises ou faire des sculptures en papier mâché.



Emilie Chazerand : L’école, voyons ! L’école est l’endroit où tout commence. À la maison, il n’y a pas de grands liseurs. (oui, ingurgiter toute la collection Harlequin ne fait pas un grand liseur selon moi, pardon toi qui te reconnaitras.)
Emilie Chazerand : Avoir un rituel d’écriture est un luxe que je ne peux m’offrir. Ça signifie que l’activité littéraire est officielle, reconnue, installée et organisée. Moi, je suis maman d’une fille de trois ans et d’un bébé de neuf mois. Le seul rituel que j’arrive à maintenir est celui de me brosser les dents… J’écris quand je peux, quand j’y arrive. Avec mon petit ordinateur sur les genoux, un pied qui actionne la balancelle du bébé, une main qui tente régulièrement de diminuer le volume de Zig et Sharko. Un jour, peut-être, j’aurai un vrai rituel d’écriture, comme les vrais auteurs. Espérons qu’à ce moment-là, j’aurai encore un peu d’inspiration pour que ce soit profitable…

Emilie Chazerand : Le Petit Nicolas, évidemment ! Sempé est mon dieu personnel. Je suis tellement admirative de son génie que je me demande parfois pourquoi continuer à tenter de produire des trucs qui seront fatalement moins bons… Catherine Certitude était ma BFF, quand j’étais enfant, presque à égalité avec Emilie, de Domitille de Pressensé (mais elle avait pour défaut un horrible prénom alors que Catherine, c’était trop sympa à mes yeux). Catherine Certitude m’épate, encore aujourd’hui. 

Et puis je lisais Oui-Oui, la collection « j’aime lire », les albums de la famille Souris de Kazuo Iwamura, Heïdi, à gogo, Sophie et ses malheurs et, dans la bibliothèque verte, les soeurs Parker, Liz et Ann, dont les aventures me stressaient un max. (c’est dire si j’étais impressionnable…) Toute petite, j’étais folle des bouquins de Gyo Fujikawa. C’est un ravissement ophtalmique perpétuel.


La Licorne à Lunettes : Séquence émotion. Vous souvenez-vous du premier livre que vous avez lu seule et en entier ?

La Licorne à Lunettes : Parmi tous les livres que vous avez lu et lisez à vos enfants, quel a été / est leur préféré ?
La Licorne à Lunettes : Je tente de creuser un peu plus profond dans la caverne « fan de lecture ». Avez-vous eu la chance de rencontrer l’un de vos auteurs / illustrateurs d’enfance favoris, et si oui, quel souvenir en gardez-vous ?
La Licorne à Lunettes : Lors de séances de dédicaces, vous avez l’occasion de rencontrer vos lecteurs, les petits comme les grands, avez-vous une petite anecdote croustillante à nous raconter ?
La Licorne à Lunettes : Deux livres pour la rentrée, rien que ça ! La Fourmi rouge et Le génie de la lampe de poche, tous deux chez Sarbacane. Allez un petit scoop pour nos lecteurs, Vania 2 le retour, ça va le faire ? Non, plus sérieusement, quel est le nouveau projet sur lequel vous travaillez actuellement ?

2 commentaires
Merci beaucoup, je suis entièrement fan d’Emilie et je compte bien lire au plus vite toutes ses oeuvres… dont un certain Monsieur Ours qui apparemment n’arrive plus à rentrer dans son slip !
Article super intéressent, j’ai découvert plein de livre que je pourrai lire a mes enfants !