En couple

Être en couple, est-ce deux moitiés qui forment un tout ? Deux individualités qui en créé une troisième ? Quelle place le « Nous » laisse-t-il au « Je » ? Faut-il suivre un Code de la Route à deux ? « Ils se marièrent et eurent beaucoup d’enfants » est-elle obligatoirement l’épitaphe du coup de foudre ? Y a-t-il seulement besoin d’une règle dans tout ça ?

Bahia a 17 ans. Féministe, passionnée de cinéma, indépendante et déterminée, elle rêve de devenir cinéaste. Au début de son année de terminale, elle vit une histoire d’amour avec Milosh, un des garçons de leur bande d’amis. Très vite, chacun semble avoir un avis sur leur couple. Mais Bahia est tiraillée entre ce qu’elle ressent, ce qu’elle rêve et ce que le fait d’être en couple semble impliquer. Peut-on s’aimer et ne pas vouloir être en couple ? Bahia a fait un choix : « Je t’aime mais je ne veux plus être avec toi ».

Chapitre après chapitre, Coline Pierré nous emmène au plus près de l’introspection de Bahia, sur cet amour qui la remplit mais qui semble aussi la définir, et la réduire d’une certaine façon. Assis sur ce banc entre Milosh et Bahia, on suit le cheminement de cette histoire qui s’est arrêtée. Je crois que c’est de suivre les hésitations de Bahia qui m’a le plus touché, c’est assez novateur de montrer d’autres formes de ressentis face à la définition de l’amour, de faire partager ces doutes, cette colère face aux modèles établis qu’on n’a pas obligatoirement envie de suivre, cette liberté d’être soi avant tout.

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Sans armure

« Ta voix qui se tait, 
…c’est ma vie qui se défait. »

Un réplique hurlée qui cingle « Tu ne comprends rien ! », une porte qui claque, et les murs semblent s’écrouler autour de Yannick. Sidérée par la violence de la séparation brutale, elle ne comprend pas en effet.

Un amour brisé, le silence de Brune, insupportable.

Et le récit va emporter alors la lectrice/ le lecteur dans un tourbillon de souvenirs qui retracent la rencontre entre ces deux jeunes femmes, leurs enfances, leurs traumatismes, à travers la voix de Yannick qui continue de parler à Brune. Comme si ce dialogue intérieur était la seule possibilité de garder le lien, si vital. Un récit qui court comme la narratrice vers celle qu’elle aime, pour la retrouver coûte que coûte.

Tout part justement de la voix, de celle de Brune à la radio : un coup de foudre auditif pour Yannick qui tombe amoureuse de ce timbre qui la fait vibrer. Une voix qui fait du bien. « Et quand j’enlève mes écouteurs, j’arrache un peu de ta voix sur ma peau ».

La force de ce texte tient au rythme insufflé par la narratrice qui ne s’arrête jamais de parler à son amour parti. Des phrases courtes comme autant de pulsations. Un flux continu comme un massage cardiaque indispensable, pour le tenir encore en vie, ce fragile et pourtant si intense amour.

Mais il y a la détresse de Brune dans ce monde aux bruits et aux douleurs qui la déchire, elle,  l’hypersensible, l’émotive sans filtre, la différente comme elle se définit. Yannick la découvre derrière son masque. Ayant alors confié sa fragilité, Brune est sans armure. Mais toute la force d’amour et la douceur de Yannick ne suffisent pas. « J’ai tellement cru me mes bras seraient assez forts pour toi… »

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Le discours

(c) Gallimard

Sygne, une collection pour les voix neuves ? Et bien, c’est réussi ! 

Alors, attention, ce livre risque de vous faire cracher votre thé, café, bière, verre de vin ou tisane dès les premières pages. Ne lisez pas la bouche pleine de liquide en face de quelqu’un car l’éclat de rire vous attend au tournant d’une page et cela risquerait de vous placer dans une situation délicate envers votre voisin (on vous aura prévenu). 

Adrien, la quarantaine désabusée, est en proie au désespoir car Sonia n’a pas répondu à son message de 17h24…

Et là, c’est le drame, la chute dans un trou sans fin, dans les limbes de la presque folie, dans la perte des repères les plus stables…

Faut-il écrire un 2e message ? Faut-il faire semblant de s’intéresser à ce gratin dauphinois qui vient d’arriver sur la table du dîner familial ? Comment écrire ce discours de mariage demandé par son beau-frère alors que Sonia ne répond toujours pas ?

La vie d’Adrien se met en pause forcée, entre parenthèses, et son cerveau part en live complet dans un monologue intérieur complètement barré, absurde, désopilant mais tellement touchant. Une divagation qui n’en finit par de digresser souvenirs après souvenirs, association d’idée après association d’idée. Un porte-serviette vous tape dans l’oeil et c’est parti pour un retour en enfance complètement déjanté ! 

Ah mais ouais ça réveille les zygomatiques grave quand même !

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Le potentiel érotique de ma femme

(c) Folio

Il était temps ! Où étais-je donc pour ne pas avoir dévoré cette madeleine juteuse lors de sa sortie ? N’en parlons plus, ou plutôt parlons-en justement de ce petit bijou désopilant !

Un très grand coup de coeur pour ce roman au rythme effréné, à l’écriture impertinente, mêlant humour et tendresse, réflexions intérieures sur les hauteurs et bassesses de la condition humaine, soulevant le voile sur les petits et grands déboires du quotidien amoureux et de la vie de couple, bousculant le lecteur en le convoquant en permanence dans le récit : une jolie folie totalement jubilatoire. 

Résumé : Après avoir collectionné, entre autres, les piques apéritif, les badges de campagne électorale, les peintures de bateaux à quai, les pieds de lapin, les cloches en savon, les bruits à cinq heures du matin, les dictons croates, les boules de rampe d’escalier, les premières pages de roman, les étiquettes de melon, les œufs d’oiseaux, les moments avec toi, les cordes de pendu, Hector est tombé amoureux et s’est marié.
Alors, il s’est mis à collectionner sa femme.

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Je vais rester

(c) Rue de Sevres

Une semaine entièrement organisée jour après jour par Roland pour Fabienne, à Palavas.

Mais le séjour ne se déroule pas comme prévu. Suite à un événement tragique, elle se retrouve seule et contre toute attente, elle décide de rester. Choc, stupeur, déni…

Une couverture très forte. Une intrigue surprenante. Une chaleureuse lumière d’été plongeant le personnage clé dans une ambiance protectrice.

Le bruit de la vie des autres tranchant sur ses silences douloureux. L’agitation des vacanciers à l’écoute de leur plaisir en contraste avec les arrêts sur images de Fabienne, en total décalage avec le rythme de la vie qui continue autour d’elle.

À la fois contemplatif et méditatif.
Une belle rencontre.

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