« On dirait qu’on aurait des guépards comme animaux domestiques et qu’on voyagerait à dos de tortues des mers… Ou alors on aurait une girafe comme animal de compagnie et des moutons comme doudous… Ou alors… »
L’imaginaire des enfants est un territoire sans frontière…
Surtout quand il n’est pas bridé par la virtualité réductrice et enfermante des écrans.
C’est pourtant le cas de ce petit garçon et de sa soeur, coincés chez eux par la pluie, les yeux rivés pour l’un à la télévision et pour l’autre à sa console. Ensemble, ils sont seuls, isolés du monde réél.
Le petit frère rêve que l’un des animaux sauvages qui évoluent devant ses yeux sur l’écran vienne vivre dans leur appartement.
Sa soeur est bien loin de tout ça…
Un hippopotame, des kangourous, une girafe, un dinosaure… Mais face à ces demandes répétées complètement incongrues, sa soeur l’ignore, répondant un lointain et imperturbable « Nan ».
Jusqu’au moment où, dérangée dans sa bulle virtuelle, l’agacement la conduit à réagir avec violence et frapper son petit frère sans raison.
Tu es trop bête ! Les dinosaures ont disparu il y a des millions d’années !
Ouinnn, pourquoi tu me tapes ? D’accord on ne peut pas en avoir, mais pourquoi tu me tapes ?
C’est l’électrochoc qui va réunir les deux enfants.
Pour se faire pardonner de son geste brutal, la grande soeur va entrer dans le jeu de son petit frère et commencer à rêver à ces animaux exotiques qui les feraient voyager loin de leur quotidien gris.
Elle mime les animaux qui prennent alors vie au fil des pages, repoussant loin les quatre murs de la pièce, ouvrant dès lors le champs des possible à l’imagination : des tortures des mers du sud envahissent l’appartement, suivi d’éléphants en bord de plage, puis de véloces guépards sur le dos desquels les enfants se voient aller à l’école, tout simplement…
Les voilà tous deux réconciliés sous le ciel étoilé de leurs rêves…
Mais les parents accepteront-ils de vivre avec tous ces animaux ?
Impossible. Alors comment faire ? Garder le secret et imaginer encore et toujours…
Une belle ode à l’enfance et au pouvoir d’évocation de l’imaginaire… Un lien qui relie tous les enfants, et ceux qui savent se mettre à leur hauteur pour les comprendre et partager ces moments uniques au pays des rêves… Je n’en suis jamais sorti, ou si peu, et vous ?
Un album touchant où la poésie sert un message fort. Le style des illustrations, un peu naïf, participe à l’évocation de l’univers de l’enfance. Les dessins au trait et la vivacité des couleurs, simplement traitées aux crayons de couleurs, renvoient également aux graphismes des enfants, augmentant ainsi le lien avec le jeune lecteur, qui se sent vite chez lui.
Toute la narration fonctionne sous forme de double page à fond perdu, enveloppant le récit tout en convoquant la force de l’imaginaire.
Un coup de coeur particulier pour le cadrage de la dernière double page, les yeux des enfants rivés sur ce plafond invisible, semblant chercher le regard complice du lecteur…
Comme face à un miroir, leur sourire espiègle m’a rappelé le mien et m’a donné envie de les suivre dans leurs rêves…
Auteur/Illustrateur : HyunJoo PARK
Edition : La Palissade – 32 pages – 13,90 euros
Année : Février 2018